samedi 29 mars 2014

Station d'espionnage de Teufelsberg

Difficile de trouver une illustration originale pour les très nombreux articles qui ont suivi le scandale de la NSA en Allemagne. Certains, comme le Zeit ou le Berliner Morgenpost, ont utilisé la photo de l'ancienne base d'espionnage construite par les Américains et les Britanniques dans Berlin-Ouest afin de surveiller les mouvements de troupes de la RDA (ou, tout du moins, c'est ce qu'ils sont autorisés à dire désormais). 



Pourtant, lorsque l'on montre la station avec son aspect actuel, comme le sueddeutsche Zeitung, on a plus de mal à imaginer l'administration surpuissante capable d'infiltrer n'importe quel réseau...




Une sortie de course à pied trail de Mahällö l'ayant amenée à passer devant le centre, situé sur la bien nommée colline "Teufelsberg" (la montagne du diable), et à apprendre qu'on pouvait le visiter, nous avons mis de côté l'idée. En compagnie d'un collègue de Mahällö, nous avons en fait dès le lendemain décidé de suivre la visite, organisée par un agent du renseignement américain ayant travaillé sur les lieux à l'époque, et désormais à la retraite.

Et "Spy everybody". Ils ont oublié de le mettre...


Monter en haut de la colline est déjà impressionnant : 120 mètres de haut, mais complètement artificielle. Cette colline a été construite avec les débrits de 400 000 habitations détruites pendant la deuxième guerre mondiale, afin de recouvrir une faculté qui devait faire partie de "Germania", la ville de Berlin transformée par les nazis. La dynamite n'ayant pas réussi à raser le bâtiment, il a fallu procéder autrement pour le faire disparaître. Le stade bâti par les nazis, un peu plus loin, a en revanche eu le droit de rester, voire d'être réhabilité.

Le stade et, à droite, un immeuble du Corbusier. Un peu comme , en fait.


La vue sur Berlin est alors impressionnante, pas étonnant que cela soit un endroit d'espionnage... 




Par contre, la discrétion, ce n'était pas vraiment cela : n'importe qui, même à l'Est, ne peut pas louper ces grands bâtiments blancs. Le centre avait néanmoins ses protecteurs : les sangliers de Grünewald, la forêt qui l'entoure. Sans doute des agents doubles, vu qu'ils s'en prenaient également aux Américains, qui déclaraient que les sangliers étaient leurs véritables ennemis, plus encore que les Soviétiques...


Pour que les ennemis ne puissent savoir dans quelle direction le radar était pointé, chaque antenne (il y en avait plusieurs pour capter plusieurs longueurs d'onde) était encapsulée dans de grandes boules blanches. Plus tellement blanches, d'ailleurs

Notre guide-espion a tenté de nous faire vibrer en racontant des histoires d'espions doubles, mais il nous a surtout expliqué que le travail de son équipe consistait à intercepter les commandes d'intendance faites par radio et à essayer d'en déduire des mouvements de troupes. Cela dit, le guide-espion a insisté sur le fait que l'espionnage réciproque des deux blocs a permis de calmer les angoisses que chacun aurait pu avoir, ce qui était un élément assez important de stabilité.


Le guide, nous expliquant les relations avec les européens, alors qu'il se trouvait sur un grafiti plutôt éloquant...

Après le départ des troupes qui, selon le guide-espion, a permis de montrer le très grand attachement des Allemands aux soldats américains, il a été prévu de faire des logements de luxe.

"Logements attractifs de 110 à 250 m2". Cela se voit, non ?

Visiblement, cela n'a pas marché... Désormais, beaucoup d'idée sont émises, mais il manque l'argent pour les concrétiser, sachant que le site se trouve au milieu d'une forêt, loin du centre de Berlin. 

En attendant, il y aurait jusqu'à 2000 entrées irrégulières sur le site, les jours de beau temps. Et du coup, quelques créations originales, comme cet amical mot d'accueil :


"Bienvenue moche", jeu de mot avec Hässlich qui se rapproche de "Herzlich" (chaleureux)


Des bouts de publicité par QR code (nous n'avons pas trouvé ce que c'était).



D'autres qui ont repris le concept des ondes reçues par les antennes.


Le guide a assez vite dit qu'il ne pouvait rien dire sur le scandale des écoutes de la NSA, et qu'il ne savait toujours pas si certains de ses collègues avaient réussi à capter les appels téléphoniques passés à l'Est... Néanmoins, cela a été vraiment intéressant de voir comment fonctionner une partie du renseignement réalisé par l'Ouest à l'époque, et de voir ce que deviennent ces sites désormais, en bons urban explorers que nous sommes désormais.


Moi, les seuls personnes que j'espionne, ce sont les rédacteurs du Journal de Spirou...

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